Des élections européennes aux législatives anticipées
Vers une nouvelle équation politique
Les résultats du vote ne faisaient guère de doutes, y compris parmi les plus rêveurs ; la seule incertitude planant était quelle serait l’étendue de la victoire du Rassemblement national. Le parti de Marine Le Pen, et du candidat investi Jordan Bardella, ont remporté une large victoire lors des élections européennes, ce dimanche 9 juin, avec 31,7 % des voix – et 30 sièges sur les 81 occupés par des eurodéputés français au Parlement européen.
Victoire sans appel et dissolution de l’Assemblée nationale
Le président de la République Emmanuel Macron en a tiré les conclusions, et, annonçant dans la foulée des résultats la dissolution de l’Assemblée nationale, a rappelé les électeurs à leurs responsabilités pour de nouvelles élections législatives, dont les premier et deuxième tours se tiendront respectivement les 30 juin et 7 juillet prochains. Avec, en jeu, la certitude de la nomination d’un nouveau gouvernement durant la deuxième semaine de juillet, dont la coloration politique pourrait ne pas être tout à fait la même, si l’option d’une cohabitation devait être tranchée par les urnes.
Ce camouflet pour la majorité présidentielle traduit les difficultés du président de la République et de son Premier ministre Gabriel Attal dont l’arrivée n’aura pas réimpulsé une dynamique propre à fédérer autour de LREM. Le Rassemblement national, en fondant sa campagne sur la thématique du pouvoir d’achat, a certainement étendu les suffrages recueillis par-delà son socle électoral, agrégeant sous sa bannière les mécontentements divers, et se déclarant apte à assumer les responsabilités gouvernementales.
Sous les feux de la rampe
Cette dissolution a plongé le pays dans un branle-bas de combat électoral auquel il ne s’attendait probablement pas. Avec une fenêtre de tir extrêmement réduite, seulement 3 semaines avant le premier tour, et la promesse d’une campagne expresse mais déjà édifiante à suivre. Des tentatives de forger de nouvelles alliances ont lieu, dans un temps de négociation restreint et sans certitude d’aboutir. D’un côté, la tenue de négociations pour une coalition de gauche nécessaire et à travers laquelle se joue en partie la survie de certains partis qui la composent. De l’autre, la situation rocambolesque des Républicains dont le président Éric Ciotti, après avoir appelé à l’alliance avec le Rassemblement national, évacue les militants et s’enferme à double tour dans le QG de son parti, souhaitant empêcher par là même la tenue d’une réunion visant à le destituer. C’est enfin, chez Reconquête, la rupture entre Marion Maréchal et Éric Zemmour, en raison de divergences profondes quant à la ligne à adopter. La première appelant à « l’union des droites » et voter lors des élections législatives pour les candidats RN contre l’avis du président de Reconquête, ce dernier l’a exclue de son parti, lui reprochant une « trahison ». Une situation, tous partis confondus, pleine de rebondissements dignes de séries télévisées.
Une échéance historique
Plus important à retenir : les dernières échéances électorales ont produit, au-delà des affinités partisanes, un vote sanction à l’encontre de la majorité en place. Il est possible que celle-ci n’y fasse pas exception, tant le Rassemblement national semble bénéficier d’un élan notable, et d’une image plus présentable. Demeure à déterminer s’il sera capable de conserver un tel résultat dans un scrutin très différent, marqué par des enjeux renouvelés et des oppositions certainement plus fortes, entre une probable union de la gauche et un éventuel rapprochement du parti présidentiel avec une partie des républicains – sans aborder l’épineuse question des reports de voix au nom d’une carte de « barrage républicain » déjà maintes fois tirée et peut-être plus tellement d’actualité. L’enjeu est de taille, et les responsables de tous bords appellent à se montrer au rendez-vous de l’histoire et d’un scrutin qui infléchira fortement les trois prochaines années.